Népal 2008 PH

Les liens du vivant et du minéral

Les mécanismes du monde minéral participent intimement au fonctionnement du vivant. Il s’agit autant de mécanismes microscopiques des métabolismes chimiques dans les organismes que des grands cycles de l’eau, du carbone, du phosphore ou d’autres constituants dans la nature. Les propriétés intrinsèques de ces atomes et molécules relèvent de réglages très fins leur permettant de participer ainsi aux processus vivants. Ils font émerger des mécanismes macroscopiques dans le temps et dans l’espace indispensables à la vie sur terre. Le climat est un de ces processus. Il régule la température moyenne sur terre autour de 15 ° C, température où l’eau est à l’état liquide et peut participer aux échanges métaboliques des êtres vivants qui, pour la plupart, sont composés de 80 % d’eau. L’eau possède une juste viscosité, elle ne s’écoule ni trop vite ni trop lentement dans les sols, elle reste à l’état de glace une grande partie de l’année dans les montagnes afin de se restituer progressivement aux espèces vivant en contre-bas.

La lithosphère et l’atmosphère participent aux processus vivants selon un certain nombre de mécanismes qui ne sont probablement pas encore tous mis en évidence. Il y a quelques milliards d’années, l’atmosphère terrestre était composée essentiellement d’oxyde de carbone. Celui-ci a été remplacé par l’oxygène par les cyanobactéries et par la fabrication de coquillages sous forme de carbonates. Les mouvements tectoniques contribuent à enfouir sous la croûte terrestre ces carbonates une fois tombés au fond des océans. Une partie de ce carbone est renvoyé dans l’atmosphère par les éruptions volcaniques, créant ainsi un cycle régulateur. Le phénomène tellurique le plus important participant à la vie, outre l’orbite de la planète autour du soleil, est le magnétisme terrestre qui dévie les vents de particules solaires. Autrement ces vents chasseraient l’atmosphère comme ils l’ont fait sur d’autres planètes du système solaire telles que Mars où le magnétisme est faible. La radioactivité naturelle du noyau terrestre produit la chaleur nécessaire aux mouvements tectoniques et participe aux mutations génétiques et donc à l’évolution des espèces vivantes.

Les causes de ces liens de causalité entre le minéral et le vivant sont bien mystérieuses. Les sciences pures et dures rejettent un finalisme possible entre les deux.

Et pourtant l’infinie complexité de tous les processus microscopiques et macroscopiques entrant en jeu dans le fonctionnement du vivant permet de s’interroger sur la nature de ces liens. Les affirmations que c’est Dieu ou Darwin qui orchestrent l’univers sont intellectuellement confortables, et probablement ni entièrement vraies ni entièrement fausses.

Comme je l’ai souvent fait dans mes écrits, je formule l’hypothèse que des formes d’intelligences œuvrent à tous les niveaux d’organisation de la matière, de la particule élémentaire au cosmos. Elles fonctionnement et gèrent le monde à différents ordres de grandeurs de temps, de la nanoseconde aux durées géologiques et cosmiques.

Les catastrophes

Les catastrophes naturelles qui affectent apparemment de plus en plus souvent les œuvres humaines seraient-elles dues à des réactions de ces intelligences enfouies dans la nature ? Les compagnies d’assurance notent une croissance importante depuis quelques années des coûts des catastrophes naturelles ou d’origine humaine. On peut interpréter ce phénomène simplement par la multiplication des installations humaines et des contrats d’assurances ainsi que des inventaires de plus en plus précis des catastrophes. Mais sont-ce là les seules raisons ?

Il est curieux qu’en 2010 et 2011 deux tremblements de terre extrêmement dévastateurs se soient attaqués à Haïti, pays parmi les plus pauvres, et au Japon, pays parmi les plus riches. Tous deux pratiquent des religions animistes (vaudou et shintoïsme) qui sacralisent la nature, peut-être dans l’espoir de conjurer des malheurs récurrents. Ces catastrophes sont-elles porteuses de sens au regard de l’évolution du monde ?

La théodicée

La théodicée, la justice de Dieu, est la théorie, développée par Leibniz (1646-1716) notamment, disant que Dieu, qui ne peut être que bon et juste, accepte que le mal se produise en vue d’un plus grand bien. Cela est peut-être vrai lorsqu’on se place du point de vue cosmique mais certainement pas lorsqu’on agonise sous les gravats d’une maison écroulée par un séisme. Pour sauver Dieu, il faut le laisser de côté. Les intelligences réparties dans l’univers sont égoïstes comme les intelligences humaines. La nature a peut-être fini par comprendre que les activités humaines mettent en danger le phénomène vivant sur la planète Terre.

Ces catastrophes naturelles dépendent oui et non de nous. On peut construire des maisons et de centrales nucléaires à l’abri des risques de séismes et de tsunamis. Mais quels que soient les progrès il n’existera jamais de technologie absolument sûre. La mondialisation de l’économie, de l’information et des technologies prépare peut-être la mondialisation des catastrophes.

Cette insécurité ontologique est un des moteurs de l’évolution. Elle interpelle la conscience humaine tant dans ses dimensions rationnelles que morales. La rationalité humaine doit mieux intégrer dans son développement les contraintes et ses obligations vis-à-vis de la nature. D’un point de vue moral, les catastrophes devraient rappeler le devoir de solidarité vis-à-vis des victimes qui sont très inégalement et injustement frappées. Il faut éviter le malheur, mais quand il est là, il faut en tirer des leçons et agir en conséquence avec raison et avec éthique.

Les catastrophes naturelles issues du monde minéral impactent le vivant et participent à son évolution et à celle de notre vision du monde.